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LITTÉRATURE : Illusions perdues, d'Honoré de BALZAC

Honoré de
BALZAC
Illusions perdues

Livre de poche, 1837

Quatrième de couverture :

" Tu seras journaliste ", lui criait sa conscience, comme la sorcière criait à Macbeth " Tu seras roi ". Etre journaliste, c’est devenir proconsul dans la République des lettres, avoir tous les pouvoirs. L’ambition dévorera Lucien Chardon. Ses poèmes ont séduit la noblesse de province. Il monte à Paris, prend le nom de sa mère, de Rubempré, et s’introduit avec succès dans la presse et les milieux littéraires. Enivré de gloire, c’est un dandy avec tilbury et canne à pommeau d’argent. Qu’importe s’il a ruiné sa sœur et David, l’imprimeur d’Angoulême, s’il a perdu son âme pour réussir.

Cette fresque tirée des Scènes de la vie de province est prodigieuse. La caricature des journalistes et des libraires-éditeurs est féroce. Chaque personnage de cette Comédie humaine déborde d’énergie, celle dont Balzac était plein. Mais, semblent nous dire les Illusions perdues, consacrer cette énergie à se pousser dans la société c’est rater la vie et ses vraies richesses.

 

p. 6 : " L’avarice commence où la pauvreté cesse "

p. 8 : " Feuilles de vigne pleines de gibbosités violettes, purpurines et souvent panachées ; vous eussiez dit d’une truffe monstrueuse enveloppée par les pampres de l’automne ".

p. 24 : " Ces deux jeunes gens jugeaient la société d’autant plus souverainement qu’ils s’y trouvaient placés plus bas, car les hommes méconnus se vengent de l’humilité de leur position par la hauteur de leur coup d’œil. "

p. 34 : " Elle (Mme de Bargeton) prodiguait démesurément des superlatifs qui chargeaient sa conversation où les moindres choses prenaient des proportions gigantesques "

p. 122 : " Il est en effet certaines personnes qui n’ont plus ni le même aspect ni la même valeur, une fois séparées des figures, des choses, des lieux qui leur servent de cadre "

p. 177 : " L’Envie, cet horrible trésor de nos espérances trompées, de nos talents avortés, de nos succès manqués, de nos prétentions blessées ".

p. 185 : " Son esprit méridional, qui parcourait si facilement le clavier des sentiments, lui faisait prendre les résolutions les plus contraires. "

p. 299 : " Mon petit, en littérature, chaque idée a son envers et son endroit ; personne ne peut prendre sur lui d’affirmer quel est l’envers. Tout est bilatéral dans le domaine de la pensée. Les idées sont binaires. Janus est le mythe de la critique et le symbole du génie. Il n’y a que Dieu de triangulaire ! Ce qui met Molière et Corneille hors ligne, n’est-ce pas la faculté de faire dire oui à Alceste et non à Philinte, à Octave et à Cinna " (Blondet à Lucien)

p. 303 : " Il goûta pendant cette matinée l’un des plaisirs secrets les plus vifs des journalistes, celui d’aiguiser l’épigramme, d’en polir la lame froide qui trouve sa gaine dans le cœur de la victime, et de sculpter le manche pour les lecteurs. Le public admire le travail spirituel de cette poignée, il n’y entend pas malice, il ignore que l’acier du bon mot altéré de vengeance barbote dans un amour-propre fouillé savamment, blessé de mille coups. "

p. 312 : " Son œil exprimait néanmoins à la vue de cette belle réalité une confiance à laquelle des envieux eussent donné le nom de fatuité. Lui-même, il avait changé. Heureux, tous les jours, ses couleurs avaient pâli, son regard était trempé des moites expressions de la langueurs "

p. 328 : " La caractère de l’amour véritable offre de constantes similitudes avec l’enfance : il en a l’irréflexion, l’imprudence, la dissipation, le rire et les pleurs. "

p. 401 : " Son épine dorsale fléchissait avec une merveilleuse flexibilité devant la Noblesse de l’Administration pour lesquelles il se faisait petit, humble et complaisant".

p. 466 : " L’estime, fonds nécessaire à nos sentiments, est la solide étoffe qui leur donne je ne sais quelle certitude, quelle sécurité dont on vit, et qui manquait entre madame Chardon et son fils, entre le frère et la sœur. Lucien se sentit privé de cette entière confiance qu’on aurait eue en lui s’il n’avait pas failli à l’honneur ".

p. 479 : " Petit-Claud regarda Lucien en donnant à son nez en vrille l’air d’un point d’interrogation ".

p. 509 : " Ne voyez dans les hommes, et surtout dans les femmes, que des instruments ; mais ne le leur laissez pas voir " (dit par Vautrin à Lucien)

p. 512 : " Les grands commettent presque autant de lâchetés que les misérables ; mais ils les commettent dans l’ombre et font parade de leurs vertus : ils restent grands. Les petits déploient leurs vertus dans l’ombre, ils exposent leurs misères au grand jour : ils sont méprisés " (dit par Vautrin à Lucien)

p. 514 : " Nous obéissons tous à quelque chose, à un vice, à une nécessité, mais observez la loi suprême ! le secret. " (dit par Vautrin à Lucien)


Marchés léonins : qui se prend la part du lion

Gibbosité : (n. f.) Didac. Bosse produite par une convexité anormale de la colonne vertébrale. || Par ext. Saillie en forme de bosse.

Anathématiser (v. tr.) " S’anathématise " : (relig. Cathol.) Frapper d'anathème. || Par ext. Litt. Condamner, désapprouver fortement.

" Casuisme de l’enfance " : de casuistique (n. f.) Partie de la théologie morale qui s’attache à résoudre les cas de conscience || Subtilité excessive.

" Montriveau jeta sur Lucien un regard pour le sonder jusqu’au tuf " : (n. m.) Roche poreuse légère, formée de cendres volcaniques cimentées ou de concrétions calacaires déposées dans les sources ou dans les lacs.

" Personnage apocryphe " : 1. Dont l'authenticité est douteuse. Document apocryphe. 2. Se dit d'un texte qui n'est pas admis dans le canon biblique juif ou chrétien.Ý p. 199 : " A ce métier de spadassin des idées… " : (n. m.) (de spada, épée) Personne qui recherche les duels || Litt. Tueur à gages.

Satrape : (n. m.)Gouverneur d’une province, dans l’Empire perse || Litt. Personnage qui mène une vie fastueuse.

" Conspiration ourdie " : Fig. , litt. Machiner, tramer. Ourdir un complot.

" … l’atteindre au sein de ses lares et de ses pénates ". Lare : (n. m. et adj.) Nom des divinités tutélaires du foyer domestique, chez les Romains. Pénates : (n. m. pl. et adj.) Myth. Rom. Divinités du foyer ; statuts de ces dieux || fam. Chez soi.

" Une petite redingote râpée arrivée à l’état d’amadou " : (n. m. ) Combustible spongieux tiré d'un champignon.

" Des applaudissements légitimes et non stipendiés " : (adj. litt. et péj.) Qui est payé pour accomplir une action.

p. 7 : " Séjour au pays de Sapience " : (n.fém.) Sagesse, bon sens (la souriante sapience des fables de La Fontaine)

p. 50 : " Il commençait à redouter la hache de Phocion "

p. 117 : " Il revint chez David suivi de ses espérances comme Oreste l’était par ses furies "

p. 145 : " Trahison carthaginoise "

p. 176 : " Une insouciance diogénique "

p. 185 : " Protégé comme Dante par le divin laurier de Virgile ".

p. 299 : " Janus est le mythe de la critique et le symbole du génie. Il n’y a que Dieu de triangulaire ! Ce qui met Molière et Corneille hors ligne, n’est-ce pas la faculté de faire dire oui à Alceste et non à Philinte, à Octave et à Cinna " (Blondet à Lucien)

p. 303 : " Lucien, épris du paradoxe, fit monter son esprit sur ce mulet capricieux, fils de Pégase et de l’ânesse de Balaam ".

p. 364 : " Une rage digne de Milon de Crotone quand il se sentit les mains prises dans le chêne qu’il avait ouvert lui-même éclata chez Lucien ".


La Tulipe

Moi, je suis la tulipe, une fleur de Hollande ;
Et telle est ma beauté que l’avare Flamand
Paye un de mes oignons plus cher qu’un diamant,
Si mes fonds sont bien purs, si je suis droite et grande.
Mon air est féodal, et, comme une Yolande
Dans sa jupe à longs plis étoffée amplement,
Je porte des blasons peints sur mon vêtement :
Gueule fascé d’argent, or avec pourpre en bande ;
Le jardinier divin a filé de ses doigts
Les rayons du soleil et la pourpre des rois
Pour me faire une robe à trame douce et fine.
Nulle fleur du jardin n’égale ma splendeur,
Mais la nature, hélas ! n’a pas versé d’odeur
Dans mon calice fait comme un vase de Chine.